LE DOCTEUR. Bon, d’accord. ? une condition : vous ne parlez pas.
MICHEL. Je ne dirai pas un mot.
LE DOCTEUR. Vous promettez de ne pas oublier ?
MICHEL. Je n’oublie jamais rien.
LE DOCTEUR. (Soupirant.) Eh bien, c’est parfait.
MICHEL s’assoit discr?tement dans un coin. LE DOCTEUR cherche la fiche mеdicale dans son ordinateur, visiblement sans succ?s. LE DOCTEUR s’adresse, ? tout hasard, ? MICHEL.
Vous ne vous rappelez pas, par hasard, si je vous ai fait une fiche mеdicale ?
MICHEL. Vous l’avez faite.
LE DOCTEUR. Quand ? Ce matin ?
MICHEL. Non, il y a tr?s longtemps. Il y a un an, ou deux.
MICHEL. Et vous vous en souvenez ?
MICHEL. Bien s?r que je m’en souviens.
LE DOCTEUR. Pourquoi, alors, ne puis-je pas la retrouver dans mon ordinateur ?
MICHEL. Je ne sais pas. Vous voulez que je vous aide ?
LE DOCTEUR. (Le repoussant.) Pas la peine ! (Il renouvelle ses recherches dans son ordinateur.)
Entre une Femme portant un costume en prince de galles irrеprochable. Ses gestes sont assurеs, elle parle avec clartе et prеcision, a les mani?res d’une personne dеcidеe.
LA FEMME. Bonjour.
MICHEL. (Heureux.) C’est toi ?
LA FEMME. Comme tu vois, chеri.
MICHEL. Je m’ennuie de toi, ici. Je suis content que tu sois venue !
MICHEL et LA FEMME s’enlacent et s’embrassent.
LA FEMME. Rentre ta chemise et arrange ta coiffure. Comment vas-tu ?
MICHEL. ? merveille.
LE DOCTEUR. Vous permettez ? Qui ?tes-vous ?
MICHEL. C’est ma femme.
LA FEMME. (Tendant la main au Docteur.) Comme vous le savez, je m’appelle Jeanne Grelot.
LE DOCTEUR. (Abasourdi.) Enchantе.
JEANNE. Je ne vous dеrange pas ?
LE DOCTEUR. Asseyez-vous. (Il emm?ne Michel ? part.) Qui est cette femme ?
MICHEL. Mais je vous l’ai dit : ma femme.
LE DOCTEUR. Mais, tout ? fait rеcemment vous avez enlacе ? cette m?me place une autre femme dont vous avez dit aussi qu’elle еtait votre femme !
MICHEL. Docteur, vous avez des hallucinations. Il faut vous soigner. Ici, il n’y a eu aucune femme.
LE DOCTEUR, dеsorientе, prend une nouvelle dose de mеdicament. Ayant rassemblе ses idеes, il s’adresse ? JEANNE.
LE DOCTEUR. J’esp?re que vous ne vous offusquerez pas si je vous demande de me prеsenter une pi?ce d’identitе.
JEANNE. Еtrange demande. Du reste, c’est comme vous voulez. Voici mon permis de conduire. (Elle tend son document.) Jeanne Grelot. ? votre service.
LE DOCTEUR regarde attentivement le permis de conduire et le rend ? JEANNE.
LE DOCTEUR. (Perplexe.) Tout est en ordre.
JEANNE. Vous en doutiez ? Je ne vous demande pas vos papiers, parce que je sais qui vous ?tes. Il ne serait pas superflu, bien s?r, de vеrifier votre licence, mais cela est l’affaire du parquet et moi je suis avocate. ? ce propos, voici ma carte de visite.
LE DOCTEUR. Que me vaut l’honneur de votre visite ?
JEANNE. La santе de mon mari m’inqui?te.
LE DOCTEUR. Elle m’inqui?te aussi. Mais je prеf?rerais en parler avec vous, seul ? seule.
JEANNE. (? Michel.) Chеri, attends-moi dans la salle d’attente, ensuite, nous irons ensemble ? la maison.
MICHEL sort docilement.
LE DOCTEUR. Savez-vous, que votre… heu-heu… mari est malade ?
JEANNE. Qui mieux que moi peut le savoir ?
LE DOCTEUR. Et savez-vous quelle est sa maladie ?
JEANNE. Il souffre d’amnеsie.
LE DOCTEUR. Depuis quand ?
JEANNE. (Еtonnеe.) Que signifie « depuis quand » ?
LE DOCTEUR. Depuis quand est-il malade ?